Sombre part de l'histoire de Bali : les suicides collectifs
- Par bali-reve
- Le 18/11/2020
- Dans Traditions & Société
Bali est une ile si merveilleuse de l'archipel Indonésien mais comme ses iles voisines et de nombreux endroits sur Terre elle a ses pages d'histoire qui sont bien tristes et laissent un goût amère. Dans notre article nous abordons le sujet du puputan qui est le suicide collectif et qui a laissé ses traces dans la mémoire collective des Balinais.
Les suicides de masse dont nous allons vous parler portent à Bali le nom de puputan qui signifie finir en balinais et fait référence généralement à une dernière attaque désespérée mais son sens est plus proche d'un sacrifice rituel de soi-même mais tous les puputans n'étaient pas pareils et contre les armées coloniales. Il y a quelques puputans enregistés comme étant des forces balinaises contre d'autres Balinais comme ce fut le cas dans la guerre civile de Lombok en 1839.
Quand un cargo Chinois sous la protection Hollandaise s'échoua sur les récifs de la côte sud de Bali en 1904 les habitants virent l'accident sous un aspect traditionnel car selon la tradition de tawan karang "droit de récif" quelque soit le cargo retrouvé dans les eaux de la mer de Java est considéré comme un cadeau de la déité marine : Baruna. Mais les Hollandais eux avaient une vision différente de la chose et en profitèrent pour compléter leur conquête de Bali. Le résultat de l'invasion de la moitié du sud de Bali en 1904 déclencha la chute de ce qui restait des royaumes balinais indépendants mais aussi de suicides de masse.
A l'époque les Hollandais controlaient déja le nord de Bali et ils lancèrent un ultimatum aux rois des royaumes rebelles du sud : indemniser les commerçants Chinois pour la cargaison que les locaux auraient "volé" du bateau échoué, se désarmer et arrêter la pratique de l'esclavage ou se préparer à des conséquences de guerre. Quand le roi de Badung rejetta ces demandes les Hollandais se préparèrent pour le sud. En septembre 1906, Gen, M.B. Rost van Tonningen et son armée de centaine de soldats rencontrèrent peu de résistance alors qu'ils passèrent à travers les jungles pour rejoindre la capitale du royaume de Badung qui est maintenant Denpasar. Quand les troupes arrivèrent au puri (combinaise de temples et palais) ce fut dans un silence marqué uniquement par un bruit faible de tambour. C'est alors qu'une étrange procession émergea : au devant un palanquin portait le roi de Badung suivi de prêtres, gardes, femmes et enfants tous vêtus de blanc, portant des dagues kris et marchant comme en trance vers les Européens qui pensèrent que les Balinais avançant vers eux avaient consommé de l'opium qui était alors abondant dans la région. Ils refusèrent de s'arrêter et continuèrent de marcher vers les Hollandais pour s'arrêter à environ 100 pas puis le roi donna le signal et le prêtre le poignarda au torse. Tandis que certains des hommes et des femmes se poignardaient eux même d'autres chargaient les soldats. Ceux qui ne furent pas touchés par les balles des Hollandais continuèrent de se suicider ou de tuer d'autres Balinais qui étaient plus sévèrement touchés. Les femmes quant à elles jettaient bijoux et or aux troupes Hollandaises suppliant les soldats de leur tirer dessus. Des centaines de corps s'empilèrent, les vêtements blancs de la procession tournant au rouge sang. Quand le puputan prit fin au moins 1 000 Balinais étaient morts selon l'estimation des Hollandais. Il faut savoir que tous les puputans n'étaient pas suicidaires et tous ne se terminèrent pas en défaite mais la population de Badung savait à quoi s'attendre face aux troupes Hollandaises et pour eux le puputan était surement plus symbolique que stratégique, comme le dernier acte d'une dance drama. Le suicide étant très négatif à Bali pour eux le puputan n'est pas suicidaire mais davantage un combat à la mort.
Un autre puputan majeur se déroula à cause d'une confrontation car les Hollandais tentaient d'imposer un monopole de l'opium en leur faveur et le roi de Karangasem y était opposé, menant à des révoltes à Klungkung, aussi à Gelgel où fut tué par les Balinais un dealer d'opium Javanais. Mais à Gelgel les troupes Hollandaises tuèrent 100 Balinais forçant le roi de s'enfuir à Klungkung. Le 28 avril 1908 le roi de Klungkung avec 200 soldats firent une sortie du palais habillés de blanc et munis du kris qui était supposé faire des ravages sur l'ennemi selon une prophétie mais le kris ne tint pas ses promesses et le roi fut tué sous les balles des Hollandais. Immédiatement les 6 épouses du roi recoururent au puputan, se tuant elles-même pour être rapidement suivies dans leur acte par les autres Balinais de la procession.
Aujourd'hui les Balinais et autres Indonésiens considèrent le puputan comme une partie de l'héritage national de la résistance anti-coloniale. Dans cet état d'esprit le quasi anéantissement de la guerrilla Balinaise par les Hollandais en 1946 est considéré comme un puputan, un dernier combat héroique même si ce n'était surement pas à la base un suicide prévu.
En effet le 20 novembre 1946 une troupe Néerlandaise supérieure en soldats et en armes et qui tentait de reprendre Bali après le départ des Japonais procéda à un massacre au village de Margarana (à Tabanan). Ngura Raih chef de la résistance Balinaise fut tué avec tous ses hommes dans un affrontement similaire à un puputan. Depuis nombreux sont les Balinais à se rendre à cette date au mémorial de Margarana où se déroule une cérémonie d'hommage et en profitent pour visiter un petit musée qui contient quelques photos de l'époque, des armes artisanales du conflit etc. A ce mémorial se trouvent également 1 372 petits mémoriaux de pierre dédiés aux morts (photo de représentation de notre article), on peut aussi y trouver une sorte de panneau reprennant les noms des personnes décédées, d'où elles venaient etc.
Les Balinais se rappellent de cet évènement et ceux de 1906-1908 avec fierté et les commémorent avec des musées, monuments et des célèbrations périodiques. Par exemple où s'est déroulé le puputan de Badung (qui est maintenant Denpasar) un monument de bronze fut érigé au square central de Denpasar là où l'ancien palais royal était, glorifiant ainsi la résistance Balinaise avec le puputan. Peu importe les motivation des puputans leur impacte politique sur l'évolution coloniale fut important. Il y eu un très grand embarrasement des Hollandais qui eurent des difficultés à expliquer pourquoi des armes modernes étaient justifiées en infligeant un massage de personnes se suicidant et sans sérieuse résistance. Les Hollandais eux même qui voulaient imposer leurs règles d'éloigner aux barbaries telles que l'esclavage et l'immolation des veuves et ils ont été impliqué dans un massacre...
de couverture par Dewa
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